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28 octobre 2009

Intervention de Franck Pupunat

Conseil National du Parti de Gauche du 24 octobre 2009
Intervention de Franck Pupunat


Camarades,

Avant de laisser la parole à Danielle Simonet, de la commission migration sur le travail impressionnant qu’elle a conduit avec les camarades de sa commission, quelques éléments plus généraux sur la question des « sans-papiers ».
Il s’agit d’une question politique d’une sensibilité extrême car c’est un sujet violent.
Un sujet immédiat, un sujet qui brûle, un sujet qui touche au cœur et frappe la conscience de chacun d’entre nous.

Pour ma part, je me sens assez vite submergé par cette insupportable politique, par ce flot d’injustice, par cette inhumanité rampante et parfois contagieuse, par cette indifférence assourdissante, par cette honte d’appartenir à un pays dont les dirigeants se comportent en véritables sauvages quand ils renvoient par exemple des migrants en Afghanistan.
Difficile de ne pas se sentir envahis par cette violence.
Et je suis profondément convaincu que le Parti de Gauche a un rôle essentiel à jouer dans le combat qui est à l’œuvre.

La clef de notre engagement tient en 4 points :

  • La mise en perspective politique   
  • La déconstruction
  • La proposition
  • La lutte

Vous le savez, le Parti de Gauche se prononce pour une régularisation de l’ensemble des sans-papiers actuellement en France, qu’ils soient travailleurs ou non travailleurs.
Et bien cette position courageuse, ouverte, humaniste, nous devons la mettre en perspective et  la défendre dans le cadre d’un projet de société global.
Nous considérons évidemment que la planète est un patrimoine commun : nul ne choisit le lieu, l’époque, l’environnement économique, social, environnemental et politique de sa naissance.
Nous considérons avant tout les « migrations » comme une richesse, comme une opportunité extraordinaire de faire vivre et de faire évoluer notre identité à travers des échanges sociaux et culturels.
Cette alchimie, cette co-construction d’une identité commune, est par nature incompatible avec la clandestinité.
Cet horizon que nous revendiquons, que nous dessinons, se brise aujourd’hui sur les murs d’égoïsme et d’avidité érigés par les puissants.
Les règles du Commerce International ruinent par exemple des centaines de millions d’agriculteurs ;
1 milliard de personnes souffrent aujourd’hui de la faim dans le monde dont – aberration - près de 800 millions d’agriculteurs !
Les Etats-Unis, l’Europe, la France, par leur politique agricole, interdisent une véritable souveraineté alimentaire et conduisent à ce désastre.
Sans même parler du fardeau historique que nous portons et donc de la responsabilité évidente que nous avons dans cette pression migratoire, les pays du Nord et particulièrement la France  poursuivent et accentuent encore les racines du désespoir en soutenant nombre de dirigeants corrompus, en réduisant inexorablement les aides publiques au développement.
Et je ne développe par la question essentielle du dérèglement climatique, dont nous sommes les principaux responsables, et qui a déjà poussé à l’exode des dizaines de milliers de personnes et qui dans les 10 ans qui viennent en touchera des centaines de milliers !
Dans ce contexte, comment croire qu’il n’y a pas de lien entre l’enrichissement des uns et l’appauvrissement des autres ?
Au nom de quelle morale, les affameurs ferment-ils leurs portes aux affamés ?
Et pourtant contrairement aux idées reçues, les flux migratoires se font d’abord entre les pays du Sud pour 80%.
20% seulement sont des flux du Sud vers le Nord.
Et le prix à payer est lourd :
En 10 ans, entre 1998 et 2008, 12 000 migrants sont morts aux portes de l’Europe dont plus de 8 000 par noyade.
Et ce chiffre ne comptabilise pas le sort inconnu réservé à ceux qui se sont fait arrêter par les autorités Libyennes. En dépit de toutes les Conventions Internationales et notamment la Convention de Genève, l’Italie a sous-traité à la Libye l’interception des sans-papiers en mer.
Le cauchemar se poursuit en arrivant en Europe avec les traques au quotidien et ce malgré l’organisation de la résistance de plus en plus de citoyens.
Les sans-papiers subissent également et indirectement le contrecoup de la propagande dégoulinante sur le coût des soi-disant migrants.
Là encore, une idée reçue qu’il nous faut déconstruire :
En France, il y a un black-out total sur les chiffres.
En Angleterre, des études officielles du gouvernement ont été menées et montrent que si l’on fait la différence entre d’une part les impôts versés par les migrants et d’autre part  les charges et aides diverses, le solde est positif de 2,4 milliards de livres. Des études similaires montrent la même chose en Espagne et le tout est même confirmé par le rapport de la Banque Mondiale de 2006.
En revanche, la politique d’expulsion, elle, coûte très cher.
L’estimation moyenne, réalisée y compris par des Sénateurs de l’actuelle majorité l’année dernière, est de 700 millions d’euros par an.
Autre idée reçue essentielle à déconstruire et j’en termine par là :
Le mythe du fameux « appel d’air ».
Une régularisation massive engendrerait soi-disant un appel d’air.
C’est faux

La France compte 200 000 à 400 000 sans papiers.
En Italie, en 2003, une régularisation massive de 634 000 sans papiers ; en Espagne en 2005 de 690 000.
Et pour autant, aucune observation scientifique ne montre qu’il y ait eu un appel d’air des sans-papiers de France ou du reste de l’Europe vers l’Espagne par exemple.
Et si l’Espagne, pays de 40 millions d’habitants, a réussi à le faire avec 690 000 sans papiers, la France, avec 64 millions d’habitants  devrait réussir avec 200 000 à 400 000 sans papiers.
La théorie de l’appel d’air est une fable que l’on raconte pour mieux endormir la conscience collective et compter sur sa passivité complice.
Non seulement le Parti de Gauche doit remplir cette mission d’Education Populaire de déconstruction, il doit aussi systématiquement remettre en perspective les propositions et les luttes en dessinant les contours d’un véritable co-développement, je dirai presque d’un alter-codéveloppement.

Face aux flots de mensonges qui creusent chaque jour le lit du racisme et de l’intolérance, la construction de la République impose aujourd’hui d’appeler à la résistance et parfois à la désobéissance pour construire ensemble, enfin, un monde humaniste et fraternel.

Je vous remercie

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